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jeudi 13 septembre 2012

La croisade de Saint-Lucien

Un billet de Julien McEvoy

Le lobbyiste-en-chef de l’industrie du pétrole et du gaz au Québec, Lucien Bouchard, est reparti en croisade. Présentement en tournée promotionnelle dans tous les médias près de chez vous pour Lettres à jeune politicien, une tablette de 116 pages qu’il vient de publier chez VLB, il en profite pour nous enfoncer une de ses fameuses leçons dans la gorge. À 71 ans, son message est toujours le même, mais il est cette fois formulé en constat d’échec: la gauche a ruiné le projet souverainiste. Le Québec a besoin d’un « grand projet économique ».

Tout lobbyiste et auteur qu’il soit, Saint-Lucien est avant tout un éminent associé chez Davies Ward Phillips & Vineberg, cabinet d’avocats spécialisé en droit des affaires et allié indéfectible de quelques-unes des plus grandes entreprises de la planète. Ça fait longtemps que Bouchard ne travaille plus pour nous et qu’il s’exprime au nom de ses maîtres, de ceux qui signent ses chèques.

Bien installé dans son bureau au 26e étage d’un immeuble de l’avenue McGill College à Montréal, l’ex-PM s’est fait spécialiste de la création de richesse tout en propageant son discours « lucide ». C’est de son trône au sommet de la pyramide des conseillers-négociateurs du grand capital qu’il s’adresse à nous.

Pourtant, ses propos résonnent toujours avec autant écho. Finie, la souveraineté. Dans le Québec de 2012, c’est la gauche contre la droite et la gauche n’est qu’un rêve où on redistribue de la richesse imaginaire. Partout, sur toutes les tribunes, l’avocat de 71 ans nous assène son « Cessons de rêver », un message d’aîné défaitiste qui s’accompagne souvent d’un rappel: « nous sommes endettés ».

Habité par de grands principes, Bouchard est un personnage conséquent. Malgré sa fixation sur l’échec du PQ, par exemple, il se dit toujours souverainiste et péquiste. Par contre, la loyauté de cet homme réputé intègre ne va plus aux Québécois. Elle va plutôt à ceux qui ont donné à Davies Ward Phillips & Vineberg le mandat de défendre leurs intérêts. Quand ses clients, les fameux créateurs de richesse, se portent bien, Bouchard se porte bien.

À l’occasion, l’ex-PM lobbyiste doit donc s’adresser à nous afin de nous ramener dans le droit chemin, celui qui mène à son « grand projet économique ». Cette semaine, il l’a fait grâce à la promo de Lettres à jeune politicien. Demain, ce sera grâce à ses mémoires, qu’il dit vouloir écrire. Dans 10 jours, ce sera à titre de lobbyiste de Talisman Energy. Toujours le même message: un virage à droite s’impose afin d’attaquer la dette.
Tâchons de ne pas oublier que Lucien Bouchard, l’avocat, défend des intérêts qui vont bien au-delà d’un livre de 116 pages. Il est avant tout le porte-parole de ses clients, les mêmes qui ont tout intérêt à voir l’État vendre ses actifs aux enchères afin d’éviter la faillite… annoncée par Saint-Lucien depuis 1995.
 
 

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