Voici une interview que j'ai donnée dans la Voix de Cartier. Interview donnée le 2 septembre 2012...
Isidore Grao
Interview de La
voix du Peuple Québécois : Michel Bertrand
Le 2 septembre
2012
Liminaire : La campagne
électorale s’achève. Le 4 septembre, c’est à dire après-demain, nous aurons les
premiers résultats et le lendemain les résultats définitifs. A l’heure actuelle,
les sondages donnent le PLQ battu. Mais il faut toujours se prémunir contre des
chiffres qui quelquefois se sont révélés ensuite très
aléatoires !
IG : Pourriez-vous, d’ores et déjà, nous faire
connaître vos pronostics en la matière ?
MB : Selon moi,
le Parti libéral c’est derrière, c’est le Parti Québécois qui fera un
gouvernement minoritaire et la CAQ qui sera l’opposition officielle.
IG : Croyez-vous
dans ce cas que Pauline Marois pourrait se voir
confier la tâche de faire un gouvernement majoritaire ou minoritaire ?
MB : A mon avis
minoritaire si l’on accorde foi à tout ce que l’on entend !
IG : Pourquoi ce
choix ?
MB : Par rapport
à tout ce que j’entends à la radio, sur internet, à la télévision, à ce que les
gens me disent ! Moi j’ai déjà voté par anticipation et tous les gens qui ont
voté déjà m’ont déclaré avoir voté pour
le PQ.
IG :
Effectivement j’ai été surpris récemment en lisant que près de 20 % des
électeurs avaient déjà voté par anticipation !
MB : Oui, on est
plus d’un million d’électeurs à avoir déjà voté.
IG : C’est dire
que ces élections vont connaître un grand engouement !
MB : Oui mais
cela exprime aussi le raz le bol du Québec
IG : Au niveau
des campagnes. Laquelle des campagnes des trois partis Québécois les plus importants, vous a paru la
plus crédible ?
MB : Ni l’une,
ni l’autre. Il faut savoir que le 4 au soir je m’attends à ce que le PQ soit
gagnant et que Pauline Marois soit nommée Première
Ministre. Evidemment puisque j’ai voté PQ je vais probablement gagner mes
élections. Mais je ne peux même pas dire que je vais être content de cette
victoire. C’est la première fois de ma vie que cela m’arrive ! Parce qu’en ce
qui me concerne, et au niveau de la politique plus aucun parti ne me satisfait.
J’ai de plus en plus l’impression que les partis sont là pour leur propre
intérêt et non celui de la population. Et que l’on parle des Libéraux, de la CAQ
ou du PQ c’est du pareil au même. Le seul parti aujourd’hui qui me plaise, est
Québec Solidaire.
IG : Je crois me
souvenir qu’un jour, lors d’une précédente interview, vous m’aviez déclaré que
vous aviez quelque estime pour Mme Françoise David qui est la chef de
QS !
MB : Oui c’est
une femme que je connais, et que j’adore, que je respecte énormément. Je sais
qu’elle a de bonnes idées. Je ne dis pas que l’on pourrait mettre en place
immédiatement ces idées mais par contre je sais qu’il s’agit de quelqu’un qui
est proche du peuple et qui ne parle pas «des deux cotés de la bouche».
IG : Je suis
intrigué par ce que vous venez de déclarer. Si les politiciens au Québec ont
mauvaise presse, s’ils sont peu crédibles, pourquoi dans ce cas continuer à
faire des élections ?
MB :
Effectivement votre question semble logique mais je reconnais qu’après avoir
tant de fois été déçu, on en arrive à être désabusé, et on continue à voter en
espérant que l’on pourra élire cette fois-ci le moins mauvais des candidats. Je
devrais pourtant dire le meilleur des
candidats, mais ce n’est pas le cas ! On parle des trois partis principaux. Le
PQ et le PLQ, on connaît. La CAQ est un nouveau parti qui a ramassé les anciens
de l’ADQ. Peu importe. Les partis en campagne électorale nous annonce toujours
des choses. Et une fois élus ils font l’inverse de ce qu’ils ont déclaré. De
même pendant la campagne ils annoncent tous les jours quelque chose de nouveau !
Ceci fait qu’à la fin de la campagne on n’en sait pas plus qu’au premier
jour !
IG : Pourtant ce
ne sont pas les déclarations qui ont manqué !
MB : Vous avez
raison. Mais par contre un jour on vous dit blanc et le lendemain on est capable
de vous dire l’inverse de la veille. Alors que croire ? Finalement on arrive à
ne plus croire en les déclarations. Un autre exemple, celui des débats
télévisés ! Comment ne pas être déçu
quand Charest traitait Marois de menteuse et que Marois faisait l’inverse. Plus tard c’était Legault qui
traitait Charest de menteur ! Ce n’était plus un débat politique ca devenait une
foire d’empoigne. Quel message croyez-vous que l’on puisse tirer de ces
affrontements ?
IG : Il faut
reconnaître qu’en campagne électorale on sait que les candidats ont recours
quelquefois à l’outrance !
MB : C’est
Charest qui revient sur des événements de 1995, lors du référendum. On veut
connaître le programme d’avenir et non un bilan d’inventaire ! Legault lui dit à
Charest que celui-ci va se mettre à genoux devant Harper. On est rendu à voter
«pour le meilleur des moins pires». Cette année je ne pense qu’en toute
conscience et que malgré les résultats obtenus,
aucun parti ne pourra déclarer qu’il a gagné ces élections. De
toutes les façons je ne sais pas avec ce panorama politique si Marois pourra diriger correctement le Québec avec un
gouvernement minoritaire ! Moi je crois que nous allons être condamnés à aller
voter à nouveau l’année prochaine. Je ne vois pas que si Marois est élue elle puisse rester Première Ministre comme
Charest pendant plusieurs années.
IG : Oui mais si
elle est minoritaire et qu’elle fasse alliance
avec un autre parti, par exemple le QS, alors dans ce cas, le
gouvernement pourrait devenir majoritaire, non ?
MB : Je suis
d’accord, sur la théorie. Mais en fait on sait que les sondages donnent le QS
avec 9,6 % des votes actuellement. Mais cela ne ferait pas forcément une
douzaine de députés élus, mais plutôt que trois ou quatre car cela fonctionne
par la majorité obtenue dans chaque comté, et c’est tout. Donc dans certains
comtés certains députés seront élus avec moins de voix que dans le comté voisin.
En généralisant à l’extrême ! Imaginons que le PLQ obtienne 500 000 votes et le
PQ 490 000 votes il se peut très bien que ce soit le PQ qui devienne majoritaire
bien que les Libéraux aient obtenu plus de voix que le PQ.
IG : Vous faites
allusion au type de scrutin «uninominal à un seul tour» et au découpage des
circonscriptions. C’est pour cela que les petits partis réclament toujours un
scrutin à la proportionnelle. Au final ce n’est pas parce qu’on a plus de voix
qu’on aura plus de députés.
MB : Oui mais en
toute équité un vote devrait compter pour un vote. Mais dans les instances
personne n’écoute le peuple !
IG : Oui mais
avec une multitude de partis représentés il s’avère difficile de pouvoir mener à
bien un projet politique cohérent !
MB : Mais alors
pourquoi les partis ne feraient-ils pas des alliances pour obtenir cette
majorité ?
IG : Pour
revenir aux programmes politiques maintenant, ne croyez-vous pas que c’est dans
la manière que Charest a traité le problème estudiantin ce printemps qui lui
vaut maintenant ce déni de reconnaissance de la part de la population
québécoise, car au début 2012 personne ne l’aurait donné perdant
?
MB : C’est
beaucoup plus que cela. Ce sont toutes les choses qui se sont produites depuis
bientôt dix ans qui sont causes de tout cela. Et de plus avec leur inertie et
leur inaction les Libéraux perdent beaucoup de votes. Par contre ils ont fait ce
qu’ils voulaient faire sans tenir compte des désidératas du peuple. Et les gens
en ont assez de ce comportement. Les électeurs sont tellement déçus que
maintenant Charest n’est même plus certain d’être élu dans son propre comté.
IG : Il est vrai
qu’une certaine rumeur s’est fait jour récemment et je crois que c’est qui aura
affecté le plus Charest car on l’entend de moins en
moins !
MB : Et pourtant
il déclare toujours qu’il formera un gouvernement majoritaire ! Je ne sais pas
pourquoi il ne veut pas se connecter à la réalité des
faits !
IG : S’agissant
maintenant de la CAQ, ne croyez-vous que son histoire se rapproche
considérablement de celle de l’ADQ de Mario Dumont ?
MB : C’est
définitivement exact. C’est toujours le point de vue que j’ai eu depuis le début
de la CAQ. C’est l’impression que cela va faire la même chose que l’ADQ, une
arrivée triomphale lors d’une élection et une disparition à la suivante !
IG : Pour le PQ
il semble que les RIP (référendum d’initiative populaire) soit un thème difficile à maitriser ! Peut
être parce qu’il fait allusion à la souveraineté ? Qu’en
pensez-vous ?
MB : On peut
demander un référendum pour la souveraineté mais on peut en demander un pour un
autre motif. Et il semble que la demande ne soit pas obligatoirement suivie
d’effet. Ce n’est pas parce que 15 % des électeurs vont demander un référendum
qu’on va devoir dépenser des millions de dollars. Il faut que le thème souhaité
en vaille la peine ! Que l’on aille voter pour un référendum qui ne donne rien
au bout du compte. Mais on ne peut pas empêcher les gens de le demander.
IG : À ce sujet
si le PQ est élu, croyez-vous que les conditions requises seraient réunies pour
un nouveau référendum sur la Souveraineté ?
MB : Non car
actuellement il y a trop de gens qui ne croient plus à un Québec Nation. Cela ne
va pas assez bien au Québec pour cela. Il y aurait beaucoup de choses à régler
avant. Un référendum, oui mais dans cinq ou dix ans, je ne sais pas quand le
moment opportun arrivera ! Je n’ignore pas que plus on attendra moins on aura de
chances de gagner ce référendum mais il faut attendre, sauf s’il arrivait un
revirement majeur et que les gens finissent par comprendre que seule la
souveraineté reste notre espoir. Dans l’immédiat le Québec est beaucoup trop
faible pour pouvoir revendiquer une quelconque souveraineté. Si nonobstant
cela, demain on nous proposait un
référendum sur ce thème je voterais positivement.
IG. Toujours sur
le PQ. Dans son programme Mme Marois réclamerait à
Ottawa, en cas de victoire, le rapatriement rapide au Québec de certains
services dont le programme d’assurance emploi. Et cela ma rappelle de pénibles
souvenirs de 1997/1998 sur le rapatriement des services du marché de l’emploi
dans lequel Lucien Bouchard, Premier Ministre péquiste fit 300 victimes sur les
1084 fonctionnaires concernés. Le reniement de la parole donnée ne semble pas
soulever aucune difficulté sur la notion d’intégrité !
MB : Oui je me
souviens de cela ! Mais il faut remarquer qu’au départ Lucien Bouchard n’était
pas un nationaliste. Il se disait péquiste, mais il n’en était pas un. C’était
un faux nationaliste qui n’hésitait pas à changer très rapidement d’avis voire
de parti politique. Je pense que les gens l’ont pris en pitié à cause de sa
terrible maladie. Les gens l’ont pris un peu comme une victime. Par contre quand
il était pouvoir pour ma part je ne lui ai jamais accordé la moindre confiance.
Et le temps m’a donné raison !
IG : Mais sur ce
dossier du marché de l’emploi ; il avait eu un engagement solennel du
Gouvernement péquiste qui a été renié par la suite.
MB : Oui mais
quel engagement Lucien Bouchard a respecté dans sa fonction. Je pense qu’il n’y
en a aucun !
IG : Et quand on
pense que le Conseil du Trésor a été le bras armé de cette politique il y a de
quoi s’insurger !
MB : Mais je
crois quand même que Marois n’égale pas sur ce point
Lucien Bouchard. A la limite j’ai plus confiance en Charest qu’en Bouchard,
c’est tout dire !
IG : Et sur les
deux autres partis, le Québec Solidaire et l’Option Nationale de JM. Aussant, croyez-vous en leur éclosion lors de ces prochaines
élections ?
MB : Je crois
que Québec Solidaire va faire son chemin. Pour l’Option Nationale c’est moins
évident. Mais enfin il a de très bonnes idées. Par contre j’ai l’impression que
Québec Solidaire est mieux organisé. Option Nationale est un autre parti
souverainiste qui est né du départ du PQ du député LM Aussant.
IG : Mais alors
qu’est-ce qui les distingue puisque les deux partis, à savoir le PQ de le
QS ?
MB : L’approche
des dossiers et leur compréhension sont différents dans les deux
partis.
IG : Mais à
quels niveaux : humain, économique, financier ?
MB : A tous les
niveaux, au QS, l’aspect humain forme
l’épicentre de toutes les réflexions. Il est plus à l’écoute des citoyens que le
PQ peut l’être. Au PQ c’est l’économie
qui prime avec les entreprises, les sociétés et l’aspect humain vient ensuite.
IG : S’agissant
de l’Option Nationale, il faut reconnaître que ce parti est de création récente
puisque créé à la suite du schisme qui a affecté le PQ en juin
2011.
MB : C’est exact
IG : Il semble
exister au Québec un contre pouvoir à celui des politiciens, c’est celui exercé
par la technostructure, c’est à dire les technocrates, les très hauts
fonctionnaires, une élite au sein des ministères et qui seraient dépositaire du
vrai pouvoir. Il faut remarquer qu’ils sont pratiquement inamovibles, les
ministres, non, ils ont le savoir des dossiers, les ministres, non ! Ils forment
un réseau occulte, terriblement efficace. Par ailleurs ils sont irresponsables
politiquement puisque c’est le ministre concerné qui va l’assumer, d’où leurs
surnoms de mandarins.
A remarquer que
déjà le philosophe Aristote préconisait de confier le pouvoir à une élite. Cette
situation serait connue de François Legault
qui a assuré qu’en cas d’élection il se pencherait sur ce
problème !
A votre avis si
un tel pouvoir existe, pourquoi une telle puissance a été tolérée ? Par
démission politique ?
MB : moi je
crois que cela a été toléré parce qu’il s’agit d’une habitude ! On nous donne
l’impression que ce sont les gouvernements qui décident, mais moi je ne suis pas
si certain que cela. C’est tellement entré dans les mœurs que plus personne ne
s’en étonne !
IG : Mais alors
qui détermine la politique du Québec, les ministres ou ces
technocrates ?
MB : En fait un
mélange des deux.
IG : mais alors
le fait de confier la démocratie qui est le pouvoir du peuple, à un réseau
occulte ne vous semble-t-il pas dangereux par le risque qu’il implique, celui de
glisser lentement vers une oligarchie administrative ?
MB :
Absolument ! C’est comme la mafia et l’industrie de la construction.
IG : Et que
faire alors ?
MB : Reformer
tout ce système pour redonner la voix au peuple. Moi j’ai toujours dit que les
vraies personnes qui devraient avoir le pouvoir, qui représentent le
gouvernement, c’est le peuple. Il faudrait refaire le chemin à l’envers car
cette technocratie est au service du peuple et elle doit mettre son expertise au
service du peuple et non chercher à l’en déposséder ! Au fond ce ne sont que des
employés de l’Etat et rien d’autre. Ils ont le pouvoir parce que les politiciens
leur laissent ce pouvoir et ne veulent ou ne peuvent pas le leur reprendre. Je
ne comprends pas tout le monde le sait mais personne ne réagit.
IG : Pour
terminer l’interview avez-vous quelque chose à ajouter ?
MB : Oui
j’aimerai que nous ayons des politiciens plus intègres et plus à l’écoute du
peuple Québécois. . Où est la période heureuse où nous n’avions pas des
politiciens mais des hommes d’Etat, je pense à Bernard Landry, Jacques Parizeau,
et le regretté René Levesque.
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