Mis à jour le: 27 juin 2012 03:01
Les politiques d'accès à la propriété de la Société canadienne d'hypothèques
et de logement (SCHL) contribuent à faire perdurer la crise d'accessibilité au
logement au Québec et fragilisent l'économie canadienne, selon une étude de
l'Institut de recherche et d'informations socio-économiques (IRIS).
Ces politiques favorisent la construction de condominiums au détriment du
logement locatif et du logement social, ce qui accroît la pénurie de logements
et fait grimper les prix, au détriment des moins nantis, selon Philippe Hurteau,
chercheur à l'IRIS et coauteur de l'étude, publiée mercredi.
« Au milieu des années 1990, le gouvernement fédéral a décidé d'abandonner la
construction de logement social et de logement locatif par l'entremise de la
SCHL, ce qu'elle faisait traditionnellement, pour favoriser beaucoup plus des
politiques d'accès à la propriété. Le résultat est qu'il y a une pénurie de
logements locatifs », a affirmé M. Hurteau, en entrevue à RDI.
« Par exemple, à Montréal, cette année, il y a 183 unités de logement locatif
en construction, contre 10 000 unités en condominiums, relève-t-il. Le taux
d'inoccupation des logements est de 2,2 % à Montréal, 0,7 % à Québec et varie
entre 0,1 et 0,3 % en Abitibi. » Un seuil d'équilibre se situe normalement à
3 %.
« On a des politiques d'accès à la propriété qui répondent à un certain
besoin, les gens veulent s'acheter des condos, ce qui laisse de côté un besoin
social de plus en plus important, qui est le logement locatif, tout en créant
une situation de surchauffe du marché du condominium », ajoute le chercheur.
« Avec l'augmentation des mises en marché, l'augmentation des prix, il y a
aussi une augmentation des unités de condo qui ne trouvent plus d'acheteurs.
Donc, la situation nous fait craindre une déstabilisation du marché dans les
années à venir », explique-t-il.
M. Hurteau soutient que, puisque la SCHL garantit les hypothèques, si le
marché immobilier s'écroule, le gouvernement fédéral sera ultimement responsable
et devra garantir le paiement des hypothèques de plusieurs ménages. « Déjà, les
ménages canadiens sont surendettés, le taux d'endettement des ménages au Canada
est de 152 %, donc la situation fragilise l'économie canadienne et qui fragilise
l'état des finances publiques », dit-il.
Selon lui, les mesures prises la semaine dernière par le gouvernement fédéral
pour resserrer davantage les règles en matière d'emprunt hypothécaire sont
insuffisantes pour régler la crise actuelle. « C'est un pas dans la bonne
direction, on atténue une situation qui était problématique, mais c'est
insuffisant parce qu'il n'y a pas d'intention de revenir à une politique de
construction de logements locatifs, ou du financement du logement social »,
affirme-t-il.
Selon lui, les gouvernements québécois et canadien devraient revenir à ces
politiques, et la SCHL devrait prêter directement de l'argent aux ménages
canadiens à un taux d'intérêt plus bas que celui du marché, au lieu de garantir
des prêts hypothécaires, ce qui permettrait de sécuriser le marché immobilier.
L'IRIS est un institut de recherche « sans but lucratif, indépendant et
progressiste », selon son site Internet. « L'Institut produit des recherches sur
les grands enjeux de l'heure et diffuse un contre-discours aux perspectives que
défendent les élites économiques », peut-on y lire.
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