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mercredi 22 août 2012

Élections Québec 2012 - Le duel Charest-Legault dominé par l'intégrité et l'économie


Par Sophie-Hélène Lebeuf et Marc-Antoine Ménard, www.radio-canada.ca, Mis à jour le: 22 août 2012 02:22
 
Le second face-à-face entre des chefs de parti, opposant Jean Charest, du Parti libéral (PLQ), et François Legault, de la Coalition avenir Québec (CAQ), au réseau TVA, s'est déroulé mardi soir sur un ton beaucoup moins acrimonieux que la veille, même s'il a donné lieu à des échanges musclés.
Les deux adversaires se sont affrontés sur les thèmes de la gouvernance, des politiques sociales, de l'économie et de l'identité nationale.
La gouvernance
François Legault, qui, depuis le début de la campagne, présente son parti comme étant le plus apte à lutter contre la corruption, a dû se porter à la défense de son champion de l'intégrité dès les premières secondes du débat.




De nouvelles allégations touchant le candidat de la CAQ dans Saint-Jérôme, Jacques Duchesneau, rapportées par Radio-Canada quelques heures avant la tenue du duel, ont donné le ton au premier segment.

Ces nouvelles allégations portent sur des dons anonymes qui auraient été récoltés lors du lancement de la campagne à la mairie de Montréal de l'ex-chef de police, en 1998. D'ex-collaborateurs de Jacques Duchesneau affirment qu'à l'époque, son organisation n'avait déclaré dans ses états financiers qu'une infime partie des dons anonymes, ce qu'a nié le principal intéressé.

Jean Charest en a profité pour demander au chef caquiste s'il appliquerait à son candidat vedette la « tolérance zéro » qu'il prône en matière d'intégrité.

M. Legault a défendu son éventuel vice-premier ministre, arguant qu'il n'y avait aucune preuve et que les témoignages avaient été faits de façon anonyme. « M. Duchesneau a été enquêté [sic] par le Directeur général des élections, et ils n'ont rien trouvé, a-t-il rappelé. Donc, je pense que si M. Duchesneau avait eu quelque chose à se reprocher, ça fait longtemps qu'on l'aurait sorti, avec tous ceux qui sont contre lui actuellement. »

François Legault a réitéré que la première loi adoptée par un gouvernement caquiste aurait pour objet l'intégrité. Il est rapidement passé à l'attaque sur son thème de prédilection, reprochant de nouveau à M. Charest d'avoir de son côté attendu deux ans et demi avant de déclencher une commission d'enquête sur l'industrie de la construction.

Demandant si le premier ministre ne s'était pas montré « trop tolérant avec ses ministres, il a également questionné l'intégrité des anciens ministre Tony Tomassi, qu'il a accusé de favoritisme dans l'octroi de places en garderies, Michelle Courchesne, blâmée deux fois par le vérificateur général, et Nathalie Normandeau, qui avait accepté des billets pour un spectacle de Céline Dion offerts par l'entrepreneur Lino Zambito.

Le chef libéral a notamment précisé qu'il avait relevé Tony Tomassi de ses fonctions « dans l'heure » où il avait appris qu'il avait un compte de dépenses avec une entreprise.

Jean Charest a en outre vanté le bilan de son gouvernement en matière d'intégrité, mettant de l'avant la création de l'Unité permanente anticorruption (UPAC) et l'adoption d'une dizaine de lois.

Martelant que son rival n'était « pas fiable », Jean Charest l'a pour sa part accusé d'avoir changé d'idée quant à la commission Charbonneau. François Legault avait critiqué la commission et son procureur en chef, Me Sylvain Lussier, en début de campagne, accusant ce dernier d'avoir manqué à son devoir de réserve.

Politiques sociales

Sur le thème de l'éducation, le chef libéral a vanté le taux de diplomation au Québec, et affirmé que son gouvernement avait contribué à l'améliorer de 89 %. Jean Charest a de nouveau évoqué les compressions sous le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard, à la fin des années 90, accusant son adversaire, élu sous la bannière du Parti québécois en novembre 1998, d'avoir « coupé sauvagement dans l'éducation ».

M. Charest a soutenu que la promesse de M. Legault d'augmenter les salaires des professeurs allait ouvrir la porte à de très longues négociations avec 500 000 employés du secteur public qui voudront obtenir des conditions similaires.

« Moi, je m'assume. Pour la Coalition avenir Québec, l'éducation est la priorité absolue », a affirmé François Legault, ajoutant que « la seule fois » qu'il avait vu M. Charest se préoccuper d'éducation, c'est lors de l'annonce de l'installation de tableaux interactifs dans les écoles.

M. Legault a rappelé des articles soulignant que le lobbyiste du fabricant de ces tableaux, Smart Technologies, était un ancien membre du cabinet de M. Charest, Martin Daraîche. Cette affirmation a fait bondir ce dernier, qui a reproché à son adversaire de tomber dans les attaques personnelles.

Sur la santé, Jean Charest a estimé que la promesse de la CAQ de donner accès à un médecin de famille à chaque Québécois en un an est irréaliste. Il a accusé François Legault d'être « si peu fiable qu'il continue de répéter sur les médecins de famille ce qui est totalement irréaliste », et de se faire des illusions en pensant qu'ajouter le nom d'un patient sur la liste d'attente d'un médecin donne accès à ce médecin.

« Le champion de la non-fiabilité, c'est vous », a répondu M. Legault, soutenant que Jean Charest n'avait pas rempli ses promesses de baisses d'impôt, de gel de la TVQ et de réduction du temps d'attente dans les urgences.

Le chef de la CAQ a affirmé que le chef libéral manquait de courage, et, s'appuyant sur un rapport du CIRANO, que les médecins peuvent en faire plus et que des gains d'efficacité sont possibles dans le réseau de la santé, en coupant dans les structures et la bureaucratie.

François Legault promet d'investir 500 millions de dollars pour accroître le nombre de patients pris en charge par chaque médecin de famille, une approche critiquée par la Fédération des médecins omnipraticiens, et de réduire de 10 % le coût des achats auprès des fournisseurs.

Le chef de la CAQ a déclaré qu'il existe des problèmes de collusion en santé, en éducation et à Hydro-Québec pour ce qui est des achats auprès de fournisseurs. Jean Charest a minimisé cette affirmation, laissant entendre que M. Legault voyait des complots partout.

Vous pouvez consulter notre vérification des faits du duel entre Jean Charest et François Legault en cliquant ici.

Économie

Alors que les deux adversaires s'affrontaient sur l'enjeu de l'économie, le ton a monté à quelques reprises.

Jean Charest a notamment critiqué les réductions de coûts de 600 millions de dollars qu'entend y réaliser François Legault. « Combien de Québécois vous envoyez au chômage? 4000? », a-t-il lancé.

Jean Charest a, au passage, rappelé plusieurs des propos controversés tenus récemment par le chef caquiste. « Les jeunes sont paresseux, les parents ne sont pas bons, les femmes ne vont pas travailler pour l'argent [...] là, c'est Hydro-Québec », a-t-il lancé. « Ce n'est pas vrai que les Québécois sont des paresseux et qu'il y a 4000 employés de trop chez Hydro-Québec », a-t-il dit.

« Là, vous dites des faussetés », a fulminé le chef caquiste, affirmant que l'ensemble de la société devait valoriser davantage l'éducation.

« Regardez-moi en pleine face et dites-moi qu'il n'y a pas de gains d'efficacité à faire », a par ailleurs soutenu le chef caquiste, dénonçant les dépassements de coûts de plusieurs projets.

Quelque 6000 employés sur 23 000 prendront leur retraite d'ici cinq ans, a-t-il martelé, y voyant une « occasion en or ». « 4000 postes seront abolis [...] et personne ne perdra son emploi », a-t-il assuré, se réjouissant à l'avance d'avoir une « société d'État efficace ».

Jean Charest s'était lui-même engagé à réduire les coûts d'Hydro-Québec de 600 millions de dollars, a rappelé François Legault, « Mais encore une fois, vous n'êtes pas fiable », a-t-il lancé, empruntant à son rival libéral un qualificatif qu'il lui accole depuis plusieurs jours.

Jean Charest a pour sa part réitéré une de ses principales promesses, soit de créer 250 000 emplois d'ici cinq ans, de façon à atteindre le « plein-emploi », a-t-il dit. Il a précisé qu'il comptait notamment atteindre son objectif grâce au Plan Nord et au développement de nouveaux marchés aux États-Unis, en Europe et dans les économies émergentes.

François Legault a accusé le chef libéral d'avoir jusqu'ici créé essentiellement des emplois peu rémunérés. « Ce n'est pas la même chose de créer des emplois à 10 $ l'heure qu'à 20 $, 30 $ ou 40 $ », a-t-il déclaré.

Jean Charest a répliqué que le taux horaire moyen avait plutôt augmenté de 40 % et que le salaire minimum, lui, avait bondi de 36 % depuis son arrivée au pouvoir en 2003.

Citant en exemple la vente d'Alcan à Rio Tinto, François Legault a en outre réitéré que le Québec avait vu 20 % de ses sièges sociaux passer sous un contrôle étranger depuis l'élection de Jean Charest.

M. Charest l'a à son tour accusé de n'avoir rien fait pour bloquer la vente de Provigo à Loblaws alors qu'il était ministre péquiste, en 1998. Son interlocuteur a argué qu'il s'était opposé à la vente.

Identité nationale

Jean Charest a amorcé le débat sur ce thème en faisant référence au passé souverainiste de François Legault.

« Celui ou celle qui veut être premier ministre du Québec, sur cette question-là, doit avoir des convictions, sinon on se retrouve avec un gouvernement qui va négocier avec le fédéral en disant : Vous savez, il y a une date d'expiration sur nos ententes parce que je vais voter non jusqu'à telle date », a déclaré M. Charest.

Le chef libéral a utilisé à son avantage d'anciens propos du candidat de la CAQ dans Sanguinet, l'ex-péquiste François Rebello, qui avait laissé entendre que la souveraineté n'était que mise en veilleuse par son nouveau parti.

François Legault a assuré que son parti acceptait que la province fasse partie du Canada. « Tous les candidats de la Coalition savent très bien qu'on ne fera jamais la promotion de la souveraineté. Ça fait 30 ans qu'on est divisés au Québec, ce qu'on a besoin, c'est un gouvernement nationaliste dans la tradition de [l'ex-premier ministre libéral] Jean Lesage. »

M. Legault a affirmé qu'il fallait pour le Québec un gouvernement prêt à relancer l'économie et à défendre l'identité québécoise.

Le chef libéral a reproché à son adversaire d'avoir une vision sombre de la province et de vouloir réduire le nombre annuel d'immigrants accueillis au Québec. François Legault a rétorqué que le budget en immigration était le même qu'à l'arrivée des libéraux, en 2003, lorsque le Québec accueillait 30 000 immigrants annuellement, une donnée que n'a pas semblé contester Jean Charest. Vérification faite, le budget de ce ministère est passé d'environ 200 000 $ en 2003-2004 à quelque 300 000 $ en 2012-2013, selon des données du Conseil du Trésor.

Ce duel fait suite à celui entre M. Charest et la chef du Parti québécois, Pauline Marois, lundi soir, et à un débat à quatre, auquel participait également la présidente et porte-parole de Québec solidaire, Françoise David, dimanche.

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